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Kollektor - Canada / No More Celine D...!

par lou 4 Avril 2016, 11:15

En gros, c'est toujours le même cirque. Quelque chose comme (on prend son souffle) «Ultra rare pressage original sur Machin Records. Fabuleux psychédélisme (ou folk, ou....) par ce groupe qui rappelle le meilleur de MC5 et de Pink Floyd». Ah, un beau collector. C'est toujours tentant. Sauf que là, le truc coûte une bagnole. Et ce pourri de vendeur (John Lerequin) a le culot de préciser «état moyen, payement en cash, port à la charge de l'acheteur». Comme la description est vague, et la réédition uniquement pressée au Japon, on laisse tomber par lassitude, en se privant peut-être d'une excellente galette. Pour aider ses lecteurs à s'y retrouver, Fuzzine lance Kollector, la rubrique des super obscurités. On y traquera (sans pitié) les monstres à six chiffres, bouffeurs de budget ou les générateurs de bonnes vibrations à deux balles. Une seule règle, avoir pourri dans les bacs à solde. La plupart ayant été réédités, il est possible de ne pas entamer un mauvais karma avec son banquier. Ce mec borné (limite psychorigide) qui ne capte jamais rien au trip spaced out. La sécurité mentale, avant le grand saut. Et que brille la lumière stroboscopique sur nos happenings individuels. 

Commençons par le Canada, qui contient son lot de musiciens inconnus, et de disques à découvrir. Bien loin des infernales gorgones-brailleuses à douze poumons, devenues la norme FM (je vomis). Capables de faire avorter un troupeau de brontosaures, rien qu'en éternuant. D'ailleurs pas simple de réaliser une sélection valable, les groupes du coin sonnant, en général, comme de la mauvaise copie des copains anglais ou US. Voire des cas comme Ugly Ducklings, ou les Pretty Things timides. A croire que Neil Young a raflé tout le talent disponible. Autant prévenir que niveau genre, on va ratisser large. Des gentils folkeux aux maniaques électriques. Qui donnent précisément le départ.

Compilé à partir de bandes datant de 1974/75, le Cyborg Revisited de Simply Saucers est un   pionnier punk, à faire passer les Ramones pour des babas sous valium. On y retrouve beaucoup de plans utilisés par Sonic Youth, époque Sister. Sorte de frénésie génératrice de bruit blanc, ayant Sister Ray dans le sang. Bref, ça découpe féroce. Pour le côté far out, ils ont carrément collé un zinzin glougloutant modèle Hawkwind. Sauf que Simply Saucers connaît plein d'accords vicieux, et les utilise à merveille pour colorer son chemin de goudron et de gaz carbonique. Bande son hyper réaliste du stress moderne, Cyborg Revisited est un radical condensé d'insomnie, de burn out total, et de médications aux noms aussi bizarres que les réactions en sont inattendues. Apothicaires ayant fait leurs classes dans un laboratoire radioactif, ces gens là voyaient l'avenir du futur à leur porte. Et gueulaient bien fort contre le conformisme des idées.

Lien : Album Complet

Sans doute trop. Mis en jambes, je passe le disque de Champignons (Première Capsule, 1972) en me demandant de quel coté l'attraper. Faut assumer l'évidente influence Zappa (Hot Rats) des chouettes dialogues sax/guitare. Base vitale d'un ensemble intelligemment construit. Et pourtant je renâcle un brin. Peut-être à cause des vocaux (réduits au strict minimum) en français (avec accent) assez tartignoles, voire ridicules (Le Vieux Château, qui évoque JP Massiera dans ses moments les plus lugubres). La chose résiste tout de même (sans s'écrouler d'un coup) à des écoutes en boucle, c'est un signe.

Lien : Rêve Futur

Comme Plastic Cloud, tiens, un unique disque (1968) présentant toutes les caractéristiques du miracle permanent. Les harmonies d'abord. Complexes et belles comme celles du Buffalo Springfield. Angéliques façon Byrds, elles sont ce qu'on retient d'abord. La guitare, ensuite. Entièrement basée sur l'expression affûtée. Toute en fuzz et en bon goût. Ces gens jouaient auparavant du folk, savent donc aller à l'essentiel d'un morceau. Sans se perdre dans une complexité inutile (les schémas rythmiques sont très simples). Laissant la concurrence (cf Bent Wind) foirer le job, Plastic Cloud signait là une fort jolie carte de visite, dont on aurait bien aimé qu'elle dure plus longtemps.

Lien : Civilization Machine

Pour ce qui est de s'imposer par la durée, les gens de Reign Ghost semblent imbattables. Leurs deux albums (Reign Ghost (1969) et Featuring Lynda Squires l'année suivante) sont monolithiques à souhait. Il faut les parcourir longtemps, en extraire les qualités comme on attraperait du mercure. En fait, la problématique se résume à vouloir faire passer trop de choses dans un tuyau étroit (son affreusement mince). A l'arrivée, c'est le bordel assuré par manque flagrant d'expérience. La chanteuse possède pourtant une voix puissante, mais le collègue mâle gâche tout avec son organe banal et ultra limité. Qu'il s'obstine à imposer, comme pour prouver qu'une gonzesse ne ne va pas les lui briser longtemps. Du coup, les rares bonnes idées tombent (trop souvent) à plat. Ce  qui (vaguement) ressemble aux Doors avec Janis Joplin au micro n'est qu'une illusion en carton. Et ça dure. Autant que le permet une technique rudimentaire, bien peu adaptée aux ambitions du groupe. Vingt ans que je tente (mollement) de me faire l'intégrale de Reign Ghost, sans dormir debout. C'est pas encore pour cette fois. Même s'il faut admettre que le second album est plus nerveux et mieux construit.

Lien : Reign Ghost

Tant qu'à faire, il serait difficile d'ignorer Bent Wind, et son Sussex de 1969.  Au moins pour la valeur pécuniaire, un original valant dans les 3000 dollars. A ce prix la, le dévoué curieux est en droit d'entendre l'infini. Et c'est un pétard mouillé, qui barbote soudain dans la sono incrédule. En gros, voici un groupe de boogie ordinaire (qui mouline sans trêve un plan piqué aux Yardbirds) s'accordant ici et là une pause (pour rabâcher deux accords fauchés au Velvet Underground). A la limite, Bent Wind est un garage band moyen, desservi par une production inexistante, et qui se croit arrivé. Bon, ils ont une dégaine à rendre Quicksilver jaloux, mais c'est (TRES) loin de faire le compte. Jerry Gibas chante stablement, ceci dit. Mais il en rajoute tellement qu'on a l'impression (pénible) que ses hémorroïdes le font souffrir. Et il aurait dû apprendre un autre riff, histoire d'éviter de sonner si limité à la guitare. Quand au batteur, c'est Monsieur Boumboum, incapable de varier son jeu, d'aller au delà de son rôle de suiveur pataud. Rien ne ressortant franchement, je m'estime escroqué, et conseille d'écouter (pas d'acheter) une réédition, avant d'investir.

Lien : Sussex

Pas de chance, ce sont les coincés de Folklords qui pointent leur nez. Pas que Release The Sunshine (1968) soit génétiquement mauvais. Simplement l'auditeur a le sentiment d'écouter un groupe de séminaristes, attentifs à faire propre avant tout. Vocalement le disque est parfait. Ça se complique au niveau des compositions, qui suivent toutes le même schéma gnangnan de progression. Arrivé au bout des 14 morceaux, l’auditeur éprouve un urgent besoin de pogo et de feedback saturé. La faute aux producteurs (les nommés Jack Boswell et Bill Bessey) infoutus d'aller au delà d'une basique séparation gauche droite, avec la basse trop haute dans le mixage. Pour profiter de la guitare, on est priés d'aller au début des chansons ; quand la masse sonore rentre, elle couvre sans pitié toute la pauvre dynamique. Du coup, les meilleurs moments sont ceux sans la rythmique, faisant circuler un peu de chaleur et de passion. Enfin. Petit jeu : sauriez-vous reconnaître le plan que Lou Reed a repiqué pour Loaded ? A noter que le fils Boswell officie derrière le kit de batterie. Et a dû manger ses baguettes, en se découvrant sonner comme deux cuillères à café.

Lien : Jennifer Lee

Problème que le duo féminin Jan (Hendin) et Lorraine (LeFevre) n'a pas eu avec son douloureusement méconnu Gypsy People (1969). Le disque a été enregistré à Londres, ces dames y tiennent les guitares et les claviers, en plus d'harmoniser divinement. Et malgré les supers pointures qui usinent à leurs cotés, pas question de se laisser emmerder par des mecs. En vrac, le batteur de Pentangle, Clem Cattini (vieux pro de la caisse claire au CV interminable) le joueur de tablas de Magic Carpet et le bassiste d'Elton John contribuent à renforcer une œuvre bien  séduisante. Pas spécialement évident de réussir un tel mélange (risqué) de folk précieux (beaucoup de cordes, jamais gonflantes) teinté de raga. Dont l'identité profonde reste définitivement chez les patronnes, en bonnes surdouées. Maîtrise totale de l'écriture, pour des morceaux amples et gracieux. Complexes autant que beaux. Dans ce trop bref Éden, j'en veux au producteur (un certain Anthony Browne, par ailleurs irréprochable) d'avoir laissé passer deux caprices. Qui se voient autant que des tâches de pinard, sur le pif de Blanche Neige, et cassent le plaisir à grand coups de marteaux. Avoir autorisé la gamine de Jan à glapir, niaisement, sur une innocente chanson (qui en rougit de honte indélébile) c'est déjà beaucoup. Mais la parodie de rengaine rétro (avec son atroce kazoo) est une manière avancée de cruauté mentale. On soupçonne une forme de désacralisation radicale. Fort efficace, tant l'auditeur redoute l'arrivée de la récréation. Seules restrictions à un album rare (flop total à sa sortie) et bien réédité. Si quelqu'un sait ce que sont devenues Jan et Lorraine...

Lien : Gypsy People


Motivé, je pousse Roger Rodier sur scène. Allez mon gars, avec ta trombine à chanter dans Supertramp, sois pas timide. Superbe chose que Upon Velveatur (1972), fort bien accueilli à sa réapparition en 2006. Ce qui en fait le disque le plus connu de notre sélection, facilement. C'est largement mérité pour un recueil écorché/délicat, digne du meilleur Nick Drake (gros cliché) avec une belle guitare saturée ici et là. Si on veut ergoter, il y a un poil trop de chœurs, qui noient la voix (jolie mais limitée) de notre copain douloureux. Surtout quand il se mêle de chanter en français, et rappelle Stefan Eicher de façon frappante. Dommage que n'ait pas été privilégiée l'approche «Me cassez pas les couilles ou ça va chier» de I'm Supposed To Let It By Again. Là, on sent la colère blanche, les nerfs qui se nouent, et la vaisselle qui vole. Et il est grandiose, ce paquet de tripes sur la table. Venu de loin, libérateur. Le Roger (prénom de mon papa à moi) aurait tout plaqué, hélas, après s’être fait jeter en ouverture de Genesis.

LIEN : Upon Velveatur

On en a encore sous la godasse. Pas forcément du passionnant, d'ailleurs. Ainsi Heads Of Our Time (The Subtle Art Of Self Destruction, 1970) disque bizarre, et hyper daté dans son approche. Avec des intermèdes tordus, entrecoupés de version soul/funk (salement compétentes) de reprises. Parfois trop évidentes (With A Little Help From My Friends) s'offrant le luxe de renvoyer Joe Cocker à son job de plombier. Ou alors ils abordent une montagne (en l’occurrence Crosstown Traffic) bien dure à contourner. Et font un immense détour, pour en en venir à bout. Le traitement administré à Wichita Lineman (un tube country de 1968, aussi repris par Tony Joe White) est, à ce titre, exemplaire. Un climat jazzy, entrecoupé d'un break à faire bander Ravi Shankar. Emballé, c'est pesé ; ça passe comme une lettre à la boîte. Bizarrement, c'est le second album des anglais frappés de Second Hand qui me vient à l'esprit. En tout cas, loin de justifier le prix d'un original.

Lien : Bizarre Requiem

Ce que vous allez vous grouiller de dégotter, c'est le magnifique (MAGNIFIQUE) disque de June Wallack. Son seul et unique disque de 1976. Genre de galette à s'infuser  en caressant son mal de vivre, avec du thé brûlant. On appellera ça «chanson à textes progressive » pour faire court. Quiconque a déjà erré sur les bords dangereux du bout du rouleau devrait apprécier. Sa version du Don't Explain de Billie Holiday (moins hantée que celle de Nikki Sudden) se descend d'une seule gorgée. Seul point faible, l'instrumental Amalgame (lointain cousin du Great Gig In The Sky de Pink Floyd) est trop long. Pour le reste, j'adorerais faire écouter la chose à une superbe créature, qui trime dans les rayons du Carrefour local. La lumière tamisée, et le chauffage au ralenti. Vérifier si elle est tatouée ailleurs que dans le cou. De toute façon, avec une Shania Twain marchande de niaiseries, mais super gaulée, en face, le combat de la mémoire est inégal. Pas grave les gars, vous avez une feuille de route maintenant.

LIEN : Album Complet

Laurent

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