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Rolling Stones - Les pierres du chemin

par lou 28 Janvier 2010, 18:36

Au moment où Martin Scorcese nous assène le douloureux Shine A Light, ou la vision des Rolling Stones tristement momifiés, on nous annonce la ressortie d’Exile On Main Street, avec d’hypothétiques inédits. Deux livres et un disque pour se souvenir de l’ultime grand incendie des Roulants Cailloux.

 

Permanence de la gueule de bois. 

 

Giclée de napalm frais éclaboussant une image déjà sulfureuse, les Rolling Stones se frottant à une Amérique qui les menait au score, après Altamont. Vietnam, Nixon, Manson, condamnés à jaunir dans les mémoires.


Pas le rôdeur de minuit, éternel et sans scrupules. Un couteau dans la gorge, baby. Ou dans celle d’Angie. Pute virginale, ayant échangé le tord-boyau pour le jus de carotte.

Au temps jadis, les saisons rythmaient la vie de nos campagnes. L’information était rare, et les mythes limités aux légendes locales. Vint le temps de la modernité, et tout se fit plus dangereux. Plus présent.

 

Souvenez-vous de Cocksucker Blues, film ennuyeux et bidon. Les Rolling Stones ravageant les USA à l’été 1972.  Ces deux mois de folie ont été immortalisés sur un nombre astronomique de pirates. Assez pour se brûler les mains, si peu pour songer à articuler sa pensée.

Pour l’arrière-cour, la nourriture cérébrale imprimée, on n’a jamais fait mieux que le STP de Robert Greenfield. Avec Keith Richards gérant la démence ambiante au jour le jour, et Philippe Paringaux, maître en écriture, traduisant le tout.http://medias.francetv.fr/bibl/url_images/2008/12/15/image_49698318.jpg

 

Rien moins qu’un immense ministère de la décadence, avec secrétariat d’état à la débauche, service détaché à la défonce, et VIP’s venus s’encanailler.

 

Les Stones eux-mêmes sont ici réduits à l’état de passagers. Un concert après l’autre, à chaque jour suffit sa folie. Tout ce qui va autour ne les concerne absolument pas (même s’ils en profitent à fond). Leur organisation impitoyable encaisse les coups. Aucune importance si elle finie sur les genoux, elle est payée pour faire l’impossible.

Difficile d’être objectif devant un tel paquet. La mort, ici, n’est pas sur les T Shirt, mais se décline en une idée fixe. Et en mille manières d’approche. On lit ces pages comme on parcourt Céline. Avides de savoir quand toute cette tension va finir par exploser.

 

Manuscrit écrit en lettres de sang, dans la longue histoire du rock and roll. Il fallait vraiment ça pour les Rolling Stones.  Et nos carcasses si bien électrifiées.

 

Alors, pensez si ma joie fut complète, en apprenant que le même duo récidivait. Pour nous entraîner en 1971, dans le sous-sol de la villa de Keith. Et nous faire participer aux sessions qui donnèrent Exile On Main Street. Une Saison En Enfer Avec Les Rolling Stones devait se lire comme du Rimbaud, être le complément exact de son glorieux aîné, nous tomber sur la gueule comme une enclume…

 

Et non pas nous laisser la sensation d’avoir visité une déchetterie. Le cerveau bien vide.

 

Que ça saigne, dans le banquet des mendiants.


Drogues, stupre, gnole, ennui (beaucoup) tout ceci se parcourt comme un roman noir.

Complet, jusqu’aux truands corses, ramenant la came de Marseille, en passant par les flics arrosés chaque fois que nécessaire. Avec de temps en temps miracle, Keith (sur qui le livre est axé) lâchant trois accords. Puis partant pouponner ou se shooter. Prince d’une cour des miracles minée à chaque porte. 

 

Théâtre d’ombres. Où Jagger et Watts sont réduits au service minimum. Et où le pauvre Mick Taylor gâche son immense talent. Seul musicien sérieux, dans cette immense partouze.

 

http://www.decitre.fr/gi/01/9782915378801FS.gifLe comble du sordide étant atteint par le récit de la cure de désintox du couple Richard/Pallenberg. Départ précipité de deux junkies faméliques, vers une terre Suisse plus accueillante. Là, on est en prise avec un peu d’humanité.

 

Comme le triste épisode Gram Parsons, luciole brûlée à un jeu trop puissant pour lui. Exclu du premier cercle. Et incapable d’y survivre longtemps. Sa déchéance en devient attachante. Loin d’être une grande-gueule pathétique (Steve Stills dans ce rôle) et arrogante. Plutôt un brave gars famélique, en partance déjà.

 

L’auteur a au moins la gentillesse de nous prévenir, tout ceci repose sur des réminiscences vagues. Les participants éprouvants quelques difficultés à coordonner leurs souvenirs. Comme par exemple, le dealer de service. Celui dont on dit qu’il passait les frontières dans une caisse d’ampli. Ou que son numéro de téléphone figurait sur la pochette chiottes de Beggars Banquet. Et qui serait peut-être parti rejoindre Brian Jones. On ne sait.


Chiottes. C’est le mot.


Reste qu’on apprend comment Hendrix et Morisson sont morts (dans ce dernier cas, c’est même très plausible). Et Bill Wyman révèle enfin ses fantasmes les plus torrides et voyeuristes. Qui endormiraient un congrès d’obsédés sexuels.

Avec le recul, il est miraculeux que le dernier grand album des Stones ait surgi si grand et si fort. D’un tel chaos. Sauvé par un mixage et une production exemplaire. Mais ça, on le savait. Sans dépenser vingt euros de plus.

 

Un livre pour survivre en milieu hostile.  Un autre pour mourir d’ennui.

 

Laurent.
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