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Hackamore Brick - Rencontre avec Chic Newman et Tommy Moonlight

par lou 29 Avril 2010, 14:53

Hackamore Brick http://i156.photobucket.com/albums/t35/BetsyBleepBlop/Hackamore_Brick.jpg

 

Le goût juste le goût

Imaginez que vous ayez couru après un disque pendant presque trente ans. En connaissant tout juste le nom du groupe (« Hackamore Brick ») aperçu dans un vieux Rock And Folk. Et puis un jour, en fouinant dans la crypte obscure du rock and roll, derrière la grande armoire, il y a ce truc pas commun, bien protégé par la poussière du temps….Vous ramassez, vous soufflez sur la pochette. One Kiss Leads To Another. Consultez n’importe quelle encyclopédie dite compétente, ce sera rideau baissé, rien, nada, connais pas. Surprise, les sillons sont intacts. Et la musique a de sérieux arguments pour elle. Comme un vague relent des Charlatans qui se seraient focalisés sur le sujet. Et rien d’autre. Ou des démos du troisième Velvet Underground. Je suis sûr que Willy Deville aurait adoré. Pour vous situer le niveau New Yorkais. Rencontre avec Chic Newman et Tommy Moonlight, bombardés architectes en chef du projet.

 

Laurent : Vous êtes les deux têtes pensantes derrière un des disques les plus criminellement ignorés de tous les temps. Racontez-nous votre histoire. Je crois que vous venez de Brooklyn.

 

Tommy/Chick : On vivait à Brooklyn, mais on s’est rencontré à l’école à Manhattan. Chick jouait dans un groupe que j’ai rejoint. Puis on est parti monter le nôtre, Robbie (Biegel, le batteur) est arrivé le premier, puis parti, puis revenu juste avant qu’on enregistre le disque. Bob (Roman, le bassiste) est arrivé plus tard.

 

                                                                                                          : Par qui étiez-vous influencés, au départ ?

La scène de Brooklyn

 

Quatrièmes quartiers de New York, le premier en terme de population, Brooklyn est aussi célèbre pour ses Music Hall et cabarets que pour ses ponts historiques, mais finalement très peu pour sa population rock&rollienne. La Grosse Pomme, ville cosmopolite par excellence, est pourtant l'un des foyers où le rock s'excita, dans une veine arty que le Velvet Underground et la Factory de Warhol représenteront à jamais. Et Brooklyn vit naître en son sein quelques gloires futures du rock&roll, du ténébreux Lou Reed en passant par le contest song d'Arlo Guthrie. Néanmoins, on ne peut pas à proprement parler, quand on évoque le rock à Brooklyn, de scène, en ce sens qu'il n'y a pas d'homogénéité dans le son ou les chansons. Non, à l'image de sa population, on est davantage confronté à un melting pot des cultures, des origines, et ce mélange culturel se retrouve dans la diversité des combos rock issus de Brooklyn. Avec une unité tout de même que l'on retrouve dans cette manière si New Yorkaise de créer des atmosphères urbaines. Petit tour d'horizon de ces groupes, qui à l'image d'Hackamore Brick, ont usé leurs guitares dans les rares salles qu'offrit Brooklyn.



Vanilla Fudge : le plus connu évidemment, et l'un des seuls à réussir à dépasser les frontières New Yorkaise. Construit autour d'une des plus infernales sections rythmiques (Carmine Appice et Tim Bogert), les Vanilla Fudge construisirent un heavy psychédélique référencé qui inspira bien des combos.

 

The Vagrants : Premier groupe de rock à avoir émergé réellement de Brooklyn, et qui fut d'ailleurs l'une des références des Vanilla Fudge. C'est à ce titre le seul lien entre groupes de rock que l'on peut dénoter. Emmené par Leslie West (futur Mountain), ces garageux sont responsables de deux trois pépites rock s'inscrivant dans la légendaire Garage Story des Nuggets. Amateur de soul et de R&b, les Vagrants dégainent alors une blue eyed soul violente, agressive et pétaradante, déchiquetant l'asphalte à grands coups de riffs cinglants et de claviers virevoltants. Un premier simple tonitruant, puis une version tsunamienne du Respect d'Otis Redding feront des Vagrants l'une des figures du garage rock US.

 

Brooklyn Bridge  : Tenant son nom du célèbre vieux pont de Brooklyn, ce collectif pop a, à son actif, plusieurs albums traduisant une activité riche en la matière. Signé sur le label Buddah, le groupe bricole une pop arty délicieusement psychédélique, aux harmonies vocales enchanteresses, qui via l'ironie de ses compositions et la théâtralité de ses shows, sut se montrer subversif et original.

 

Tool Shed : Obscurité totale née d'un groupuscule d'étudiants hippies, triturant un folk urbain étrange et bordélique, engagé et arty.

 

Next Morning : Ou Hendrix qui continue à faire des ravages aux quatre coins du monde. Un seul disque, clairement influencé par Jimi, où se télescopent à l'envi pédales wha wha et déluges de fuzz sur des rythmes funky extasiant. Cet opus est l'oeuvre d'une communauté trinidadienne importante à Brooklyn.

 

Dust : Aujourd'hui connus par les amateurs de vinyles et de collectionnite aigus, Dust fabriqua un heavy rock couillu et nerveux, bien servi par l'excellent guitariste Richie Wise. À noter que celui qui frappa les caisses au sein de Dust n'est autre que Mark Bell, futur Ramones!

 

Chelsea : Avant de faire le pantin devant des ados boutonneux au sein des Kiss, Peter Criss évolua dans ce combo qui ne sortit qu'un seul LP, s'engonçant dans un hard rock lyrique passablement oubliable.

 

The Bag : À l'image des Vagrants, influencés par la soul et le R&B. Le quatuor tentera alors de bricoler une soul blanche bien carrée, qui manque malheureusement de sensualité et d'originalité.

Lou

 

 

 

 

 


 

T/C : On écoutait les Drifters, les Everly Brothers, Mary Wells, du folk (Peter Paul And Mary) et les premiers groupes anglais. L’humour de Chuck Berry et des Coasters, également.

 

L : Parlons un peu des chansons. Pas un brin de ce qui était à la mode à l’époque. Quelle a été la réaction du label ?

 

T/C : On savait qu’on ne jouait pas la musique qui plairait aux DJ. En espérant être entendu, quand même. Richard Robinson, notre producteur, avait compris ce qu’on voulait faire, et nous a laissé faire à notre idée. Il a expliqué tout ça à la maison de disques.

 

L : Vous avez eu de la promotion ? Vous pouviez vivre de votre musique ?

 

T/C : On a donné quelques concerts avant la sortie du disque. Ensuite, un engagement de six semaines (à St Thomas, dans les Îles Vierges) puis on est rentré à New York, et notre contrat s’est arrêté.

 

L : Il y a ce morceau sur la radio. Vous étiez accro à la FM ?

 

T/C : C’était plus une chanson sur la radio AM que FM. Une virée à l’époque ? Ramassez votre copine, 2 dollars d’essence (qui coûtait trente centimes les cinq litres) et faites le tour de Brooklyn pendant un moment. Garez-vous un peu. Redémarrez pour acheter à manger. Et garez-vous de nouveau. La radio marchait en permanence (AM seulement, de ce temps la). Des couples appelaient pour demander leurs chansons favorites. Radio parlait de ça.

 

L : Beaucoup de choses ont été dites sur l’ombre du Velvet Underground, derrière vous.

 

TC : Personne dans le groupe ne les considérait comme une influence. On pensait sonner comme les groupes de la première vague Anglaise (1964-66) avec l’accent de Brooklyn.

 

L : Que sont devenus les deux autres membres du groupe ?

 

T /C : Robbie vit en Floride. Il est professeur de batterie, et joue avec des musiciens de son coin. Il est venu à New York l’an passé, pour nous aider sur notre CD. Bob est prof de musique dans le Maine. Il joue toujours de la basse dans divers groupes, dont un avec sa fille, qui chante.

 

L : Que faites-vous maintenant ?

 

T/C : On rejoue tous les deux depuis 2007. Un CD de six chansons a été enregistré, et on en prévoit un autre à la fin de l’année. Depuis l’an dernier, on fait de la scène toutes les six semaines. Un concert à Manhattan en Avril, et un autre en Juin.

 

L : Vous avez été surpris de découvrir que tant de gens vous vouaient un quasi-culte ? Vous avez entendu parler de cette réédition de votre album, sur un label du nom de Mister Nobody ?

 

T/C : On a eu surtout eu du mal à croire que des gens aient entendu parler de nous dans les années 90 et au début de la décennie 2000. Cette réédition est un pirate, on n’a rien à voir avec ça. Il est prévu de sortir d’autres chansons, enregistrées en même temps que l’album. Ce sera disponible en téléchargement.

 

L : Vous connaissez la France, je crois.

 

T /C : On y a eu du bon temps. Un de mes souvenirs favoris est une petite conversation, au moment du repas, avec une dame qui tenait un café. Quelque part, entre Deauville et le Mont-Saint-Michel. Un autre est d’être resté coincé dans un tourniquet du métro, avec trois sacs et une guitare, dans la bousculade du lundi matin, à Paris.

 

 Entretien mené par Laurent.


One Kiss Leads To Another (1970)

http://www.iamthecosmos.com/uploaded_images/19089-722398.jpg


 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Sorti en 1970 sur le label Kama Sutra, One Kiss Leads To Another fait parti de ces trésors secrètement cachés dans la pléthore informe des productions américaines de l’époque. Un petit bijou intemporel où s’entremêle influence Lou Reedienne (ah cette attaque de guitare digne du premier Velvet sur Oh! Those Sweet Bananas), rock enlevé et ballades mélancoliques qu’on se déguste allègrement le long d’un Jack’s un soir de brume sentimental. Bien plus qu’une copie informe du groupe de la Factory, Hackamore Brick développe sur son unique opus une panacée excitante de ses influences, jusqu’au sublime et délirant I Won’t Be Around, où sur des notes jazzy à l’orgue le groupe développe un groove mirifique proche de ce que feront les Soft Machine de l’autre coté de la manche. Bardé de riffs implacables et d’orgues swinguant, cet opus mérite sa qualification de chef-d'œuvre ! Et tant qu’à faire, ne pas trop l’ébruiter, mais se le garder au chaud, les soirs où le monde vous dégueule son lot d’insanité… ce genre de plaisir n’a pas de prix.

lou

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lou.

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