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Mitch Ryder - Détroit - Faut que ça roule!

par lou 4 Février 2010, 08:46

http://content.mydamnchannel.com/datastore/UserFiles/mitch%20ryder.gif

Les nerfs, c’est encore ce qui sauve le meilleur rock. Vous savez, la teigne psychotique qui vous monte parfois au cerveau, et vous change très provisoirement en statue de sel. Certains disques sont comme ça, cramés de l’intérieur, rétamés, mais fiers. Aiguisés comme un cran d’arrêt, trop pressés pour chercher la solution, ils coupent. La tête, les couilles, la parole, tout doit y passer dans cette furie vengeresse. Pas question ici de plaisanterie heavy métalleuse, mais d’une bande d’arrêt d’urgence envisagée en permanence, et bien sur jamais atteinte. Le crash dans le mur d’en face soulignant seule la fin des hostilités.

 

Mitch Ryder n’est pas de ces noms qui apparaissent d’entrée, quand la conversation porte sur les tueurs blancs de la Motor City. Son rêve a lui n’incarnait pas la révolution ou l’ennui verdâtre qui vous bouffe, plutôt un idéal de soul éternel. Avec ses Detroit Wheels, il avait sorti quelques beaux et bons disques, connu un petit succès. Marquant, au passage, pour la vie, les oreilles du tout jeunot Bruce Frederick Springsteen, là-bas dans le New Jersey.  Et puis (histoire connue) son manager l’avait truandé. Si bien qu’à l’aube des années soixante-dix, n’importe quel pronostiqueur l’aurait donné forfait. Iggy et les Flamin Groovies étaient les flèches enflammées d’un archet qui visait trop juste. Et s’avouait incapable de percer le cuir épais de Grand Funk (hippopotames abreuvés de dollars). Ne parlons pas d’éviter la noyade dans le bouillon progressif que distillaient Gracious ou Greenslade.

 

Potage toujours. Je veux mon steak saignant.

 

Et puis, sur le boulevard, au tout début 1972, une Cadillac a surgi. Manquant d’écraser Greg Lake qui promenait son caniche. Putain de bagnole, rutilante  de tous ses chromes, propulsée par un moteur grand comme ça. C’était ce vieux Mitch et son nouveau groupe. La caisse en jetait, garée devant la baraque à frites de Slade. Intérieur cuir, jante large, et un maximum de rock dans la sono.

 

 http://drbristol.files.wordpress.com/2009/05/detroit-album.jpg

Avec Steve Hunter (tueur à gages patenté, le genre de gars qui confond sa guitare avec un chalumeau) au premier plan, le groupe avait fière allure. Sans frime, le gang, contrastant violement avec le glitter ambiant. Bande de vieux pros, propulsant à gogo un boogie infatigable, exacte synthèse de tout ce qui balance, et envoie la purée. Mitch nous faisait sa meilleure retape, gosier éraillé, à bout de souffle, mais toujours vaillant. Capable de se colleter avec une reprise de Wilson Pickett (rien que ça) sans passer pour le dernier des rigolos.

 

Swing baby swing. Ce soir c’est gratuit. Demain faudra acheter le chouette album, et transformer ces gars en stars. Monter un peu le volume ? Bien sûr.

 

Bon sang, quel pied d’enfer c’était. La rythmique vous massait, le pianiste se révélait infatigable. Et puis il y avait le Rock And Roll de Lou Reed, revu et corrigé rasoir, que les charts se pourléchaient d’accueillir, dans leur giron frigide.

 

 

Produit trop pur pour un système trop atrophié.

 

Non-overdose, en raison de sens castrés par trop de mellotrons dans la soupe. Le bide total, celui qui ignore le sens des mots « seconde chance ».

 

 La Cadillac est rentrée au garage, sans comprendre. Comme un boxeur déclaré perdant, alors que son adversaire pisse piteusement le sang, et compte les canines qui lui reste .

 

Insulte supplémentaire, le CD est vendu à un prix scandaleux (plus de cinquante euros). Mais la meilleure musique jamais sortie du Michigan résonne. Encore et encore sous les étoiles, aux confins du  cosmos. Là où les échos éternels tournent à jamais. Bande-son d’une de ces collisions stellaires qui vous scient en deux, pour toujours. Et fais lever le soleil, dans votre vieille carcasse percluse.

 

Qu’on m’enterre donc au son de ce disque.

 

Et je me lèverais encore pour en gigoter une dernière. Avant le grand silence. Mitch et Detroit valent bien ça.

 

Laurent.

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